vendredi 25 décembre 2009

VII. Ane Brun, Anna Ternheim et Nina Kinert

Amoureux du folk, amoureux des femmes, amoureux de la Scandinavie, cet article est fait pour vous.

Il y a deux ans, je découvrais Ane Brun, au détour de son album de reprise en duos Duets. L'année dernière, Anna Ternheim venait rejoindre mon petit univers folk scandinave, grâce au fantastique article de la Blogothèque. Il y a quelques jours, Last fm me recommandait l'écoute de Nina Kinert, une expérience dont je sorti bouleversé.

Le trio venait de prendre sa cohérence devant mes oreilles, et il me semblait impossible de ne pas vous les présenter :

Beaucoup de journalistes pressés se laissent berner et considèrent qu'Ane Brun est suédoise, alors qu'elle est norvégienne. C'est bien dommage, mais cela n'a que peu d'importance.

Ane Brun est la grâce incarnée. Dès qu'une guitare échoit dans ses mains, elle fait danser les cordes sous ses doigts et remplit l'espace de sa voix délicate et puissante. Les textes sont d'une poésie à tomber par terre, et pour qui tend l'oreille, plein de clin d'oeils.


Ane Brun - Changing of the seaons

Dans cette chanson où elle parle de la délivrance que représente le printemps, le côté assourdissant de l'été, elle conclut qu'elle est "maybe I'm too scandinavian" dans son rapport aux saisons. Pour qui n'a pas vécu en scandinavie, il est très dur d'imaginer ce que peut représenter l'arrivée des beaux jours et du soleil. Un jour, je buvais une bière en terrasse à déguster les premiers rayons de soleil du mois d'avril, lorsque mon amie m'interrompit pour me dire qu'elle s'en allait. Lui demandant pourquoi, elle me répondit qu'il lui fallait aller dans un autre bar où la terrasse était encore exposée au soleil, parce celle où nous étions ne l'était plus.


Ane Brun - The puzzle

Ane Brun a sorti plusieurs albums, dont un très remarqué Duets (2005), dont je parlais plus haut, qui est un album de duos avec de grands chanteurs folks ou autres, qu'ils soient norvégiens (Madrugada) ou autres (Syd Barret). Elle s'est fait remarquée par A temporary dive en 2005 et Changing of the seasons en 2008 est la consécration.





Anna Ternheim quant à elle est bien suédoise. Sa musique est un peu plus sombre, profonde et tragique que celle d'Ane Brun, mais tout autant poétique et mélancolique.

On entend les doigts claquer et pincer les cordes de sa guitare sèche sur sa reprise de Fly me to the moon, dans une version crépusculaire et lancinante.










Anna Ternheim - Fly me to the moon

Pour ceux qui ne connaissent pas les Chansons à emporter de la Blogothèque, le concept est simple. Il s'agît de motiver des artistes (souvent de passage à Paris pour une tournée) pour prendre leurs guitares, leurs instruments non amplifiés et aller jouer dans la rue ou autres lieux improbables. Cela peut provoquer des rencontres amusantes, des situations burlesques, et souvent des moments de poésie fabuleux. Parfois, les artistes n'ont pas le temps de bouger, et restent où ils sont, comme ici :




Anna Ternheim a sorti plusieurs albums, dont le dernier fut acclamé par la critique, Leaving on a monday, en 2008.



Nina Kinert est la dernière venue de l'histoire. D'elle je sais moins de choses, si ce n'est qu'elle est jeune (26 ans), et qu'elle est super douée.

Une voix encore une fois fantastique, qui laisse de profondes empreintes folk, assortie de textes puissants et pas toujours très remonte moral.

Son troisième album, Pets and Friends, sorti en 2008, est une petit bombe d'envoûtement. Je le recommande à tous, il tourne en boucle dans mon mp3 depuis une semaine :


Nina Kinert - I shot my man

Voilà ma petite présentation de ces trois femmes fantastiques du folk scandinave finie. Il ne vous reste plus qu'à vous saisir de leurs chansons, de leurs univers, et de leur beauté.

A bientôt, et pour finir, une petite pépite où Ane Brun et la timide Nina Kinert chantent Song 6 et où vous entendez quelques petits mots de norvégienosuédois :

SPLIT12.1 - Ane Brun - Song n°6


Ne pas oublier : ANE BRUN en concert à L'Epicerie Moderne, à Lyon, le 22 mars !!

dimanche 13 décembre 2009

VI. Odd Nordstoga

Voici enfin cet article qui me permet de m'étendre plus longuement sur un artiste qui recadre un peu plus ce panorama de la musique norvégienne. Il chante en norvégien, et il fait du folk. Alors avec ça, si vous êtes pas contents....


Odd Nordstoga - Heim te mor

Il est jeune, il est beau (?), il plaît aux vieux des maisons de retraite qui aiment les chansons folk en norvégien, il plaît aux nouvelles générations qui sont ancrés dans cet héritage folk, mais qui aiment les textes poétiques, humoristiques et délicats.



Odd Nordstoga, c'est la personnification d'une Norvège qui se cherche un héritage musical, une filiation, et qui ne peut nier les influences musicales d'internet, de la musique du reste de l'Europe, et de la pop music.


Odd Nordstoga - Heim te mor (live)

Dans ce live, au tout début de sa carrière (à l'époque de la sortie de l'album Heim te mor, 2006), l'emblème du folklore norvégien, le hardingfele (violon), disparaît au profit du banjo et d'autres instruments un peu plus exotiques (qui a dit que le tuba n'est pas exotique?). On retrouve l'esprit du folklore (les bases des musiques folkloriques européennes sont assez similaires, et fonctionnent selon les mêmes procédés), mais teinté de bonne vielle country du bon vieux Bill, le cousin norvégien émigré aux States.

Trêve de plaisanteries sérieuses, passons aux autres chansons de l'album Heim te mor, sorti en 2006 comme dit plus haut. Allez, prenons par exemple Femten songar på ein gong :


Odd Nordstoga - Femten songar på ein gong

Vous me direz tout de suite, experts du norvégien que vous êtes : mais il chante en dialecte, d'ailleurs proche du nynorsk ! Et oui, vous avez l'ouïe fine et l'oreille aux aguets. Apprendre le norvégien c'est bien, le parler, pourquoi pas, mais le comprendre, c'est toute une histoire.

Imaginez vous : vous êtes à Bergen (à l'extrême ouest de la Norvège) où l'accent est très marqué par des mots aux sonorités fortes en "a" et "r" proches du Nynorsk, et à l'université, on vous apprend le Bokmål d'Oslo (à l'extrême est de la Norvège) où les mots sont plus fluides, les syllabes plus mouillées. Et vous dans tout ça, vous essayez de vous débrouiller alors que l'on vous enseigne un dialecte opposé avec la réalité du lieu. D'autant plus, que dans une ville universitaire comme Bergen, les étudiants viennent de tout le pays et qu'ils ont chacun leur dialecte.

En fait, la langue dans ce pays, c'est comme des poupées russes. Vous avez deux langues écrites et orales pour un pays, avec des traditions linguistiques ancrées géographiquement. Il semblerait que l'on parle plus la langue de l'élite, le Bokmål, à la capitale, alors que dans le pays, on parlerait plutôt le Nynorsk. Trop simple ! Chaque région, chaque "land" a son dialekt propre. Mais plus vous rétrécissez le champ d'observation, vous vous apercevez que dans chaque région, les villages et les communautés ont tous développés des dialekt propres, du fait de l'éloignement les uns des autres et de l'isolement.

Pour vous en rendre compte, des chercheurs ont fait enregistrer le MÊME TEXTE à des habitants de différentes régions. Je vous laisse donc juger entre l'extrait enregistré à Bergen et celui enregistré à Oslo. La différence est sidérante, c'est pour ça qu'on ne parle pas de différence d'accent, mais de dialecte. Pour en écouter plus, rendez vous sur Nordavinden og sola (celui de Trondheim est collector, ainsi que la version russe, et un des plus limpides pour moi, celui des Lofoten).

Tout ce bla-bla pour dire, que oui, Odd Nordstoga chante en dialecte ! Et qu'il est pas facile à comprendre le bougre ! Bon, décidément, pas d'enregistrements sur Deezer, presque rien sur You Tube de valable. Si vous avez Spotify, on trouve des choses, mais un peu vieilles ici (et faut avoir le logiciel).




Donc, j'en resterai là pour mon hommage vibrant à Odd Nordstoga, qui m'a égaré un peu sur des considérations linguistiques. En Norvège, il est extrêmement apprécié, et ses deux albums (cliquer pour écouter), Heim te Mor (2006) et Pilegrim (2008) ont été des succès énormes, après dix années de tentatives plus ou moins heureuses pour trouver sa place entre folk et pop.

samedi 12 décembre 2009

V. Madcon

En passant dans la rue cet après midi, j'ai vu un groupe de breakdancers bouger leur corps sur une chanson que vous connaissez sûrement :





La chanson Beggin ne nous vient pas des States, d'Angleterre, de France mais de Norvège, avec le groupe Madcon. C'est une reprise du morceau Beggin de Frankie Villa and The Four seasons, qui ont sorti la chanson en 1967, dont voici une version remixée par Pilooski en 2009 (sortie quelques semaines avant la version de Madcon).






Tshawe Baqwa (Kapricon) et Yossef Wolde-Mariam (Critical) ont grandi à Oslo, d'origines sud-africaines, erythréennes, et éthiopiennes (des pays de tradition migratoire vers la Norvège). En 2008, ils sortent ce tube, issu de l'album The Dark Con of The Man.


Cet album est une bombe de flow, de groove et de rythme. J'ai écouté cet album un nombre incalculable de fois, en essayant de ne pas m'arrêter au tube introductif Beggin. Cet album est une pépite qui regorge de tubes en puissance, comme Liar :



Le beat fait bien kiffer, le flow aussi, bref, ça défonce. Ca donne envie de sortir de son fauteuil et de move son body. Par contre, niveau clip, c'est pas des champions. La dérision autour du clip américain, c'est mignon, mais au final, ils en font un tout de même (y a peut être un peu plus de blondes toutefois).


D'ailleurs, j'entends d'ici la rumeur qui gronde (hum, hum, pas un chuchotement) : "t'es bien gentil Pierre avec tes groupes norvégiens, mais y en a pas un qui chante en norvégien !". Patience, patience, aies confiance, cela va venir. D'ici là, un petit passage de l'album (que l'on peut écouter ici), est en norvégien, à toi de le trouver.


Tonalités un peu ragga, des morceaux plus R'n'B, mais toujours un tempo qui s'affole, qui prend aux tripes. 




Bon là, j'admets, on est bien loin du folk...

vendredi 11 décembre 2009

IV. Röyksopp

Ici, à la demande d'Etienne, je ne vais pas parler de savon, bien que le nom m'y fasse penser constamment, mais d'un groupe d'électro bergenois.


Remontons un peu en arrière. Nous sommes en 2001, vous vibrez encore des images des attentats, le poids médiatique vous oppresse et vous avez besoin de décompresser. Et soudain, à la radio, vous entendez ça :



Röyksopp - So Easy


Et oui, c'est Röyksopp, un groupe venu de Norvège, plus particulièrement de Bergen. A l'époque, il défraie la chronique, on parle de révolution musicale venue du froid. Parenthèse, il existe un mythique numéro de Traxx, l'émission de la 5, où l'on voit un reportage sur la création musicale à Bergen. Le reportage essaie de décrypter l'importance de Bergen comme haut lieu de la création musicale. La réponse tombe au bout de quelques artistes interrogés : "A Bergen, il y a une certaine atmosphère prodiguée par la pluie, et cela inspire les gens qui essaient de dépasser la mélancolie par la musique".


L'album Melody A.M., paru en 2001, apparaît comme un ovni dans le paysage musical électro : il paraît être au coeur de toutes les inspirations, il parle instantanément à tous. Pour l'écouter dans son intégralité, c'est ici.


Les refrains trottent dans la tête longtemps après les avoir écoutés, notamment sur Eple.


Littéralement, ce titre veut dire "pomme", un nom assez basique. A croire que Svein Berge et Torbjørn Brundtland (le premier qui arrive à prononcer le nom des musiciens en mangeant un Krisprolls (c) a gagné), sont fascinés par le règne végétal : Röyksopp veut dire "vesse-de-loup", du nom du fameux champignon. Pour la prononciation de Roÿksopp (ˈɾøʏksɔp) et pour connaître la particularité de ce champignon, je vous laisse errer sur internet.





Donc, ces bergenois férus d'électro créent la sensation et l'écoute de l'album nous replonge dans les années 2000, dans cette électro un peu chill, un peu lounge, où l'on s'imagine avec un cocktail à 15 euros dans la main, la chemise ouverte jusqu'au sternum, dans un bar aux néons bleus et roses. Un voyage dans le temps qui reste néanmoins plaisant, avec les accords de synthé, le bon vieux clavier des 70's, et les violons brassés en de petites bombes répétitives.


L'écoute de l'album nous dévoile également pléthore de tubes, de morceaux incisifs qui rappellent les génériques de dessin animé et Jean Michel Jarre (Röyksopp's night out), les airs à la Fat Boy Slim (So Easy), les déambulations oniriques d'un Mogwaï (l'incroyable Sparks) ou même les Kings of Convenience (Remind me).





Retrouvez tous leurs nouveaux albums et leurs news, sur leur site.


Sur ce braves gens, bien à vous et à bientôt pour de nouvelles pérégrinations musicales en Norvège

lundi 7 décembre 2009

III. Katzenjammer

Suite des pérégrinations musicales norvégiennes avec un groupe de femmes, pour une fois... J'avoue, je confesse, j'expie mes fautes : mon intention première de faire un panorama du folk norvégien se transforme peu-à-peu en un aperçu partiel et partial des groupes norvégiens que j'apprécie.

Faisons de mauvaise fortune bon coeur, vous ne trouverez ici bas peu de choses qui se ressemblent. Le dénominateur commun est que ces groupes sont norvégiens, mais la plupart chantent en anglais. Bientôt, je vous ferai découvrir quelques groupes qui chantent en norvégien, et même en dialecte, vous verrez, ça vaut son pesant de cacahuètes.


Katzenjammer - A bar in amsterdam (leur tube)

Bref, trêves de plaisanteries sérieuses, passons au vif du sujet. Katzenjammer, c'est un peu un groupe de Noël. Partons de la chanson Tea with cinnamon.


Katzenjammer - Tea with cinnamon

Déjà le titre : tout ça évoque beaucoup de choses à un apprenti norvégien comme moi. Le thé me fait replonger dans l'atmosphère des cafés "så koselig" de Bergen. "Koselig" (cosy en anglais) est un concept norvégien fort, qui sous des dehors innocents nous en apprend beaucoup sur l'ethnologie norvégienne, mais j'y reviendrai. "Cinnamon", c'est la cannelle, ingrédient phare de tous les desserts et aliments sucrés, une odeur et un goût entêtant, surtout à Noël. A cette époque de l'année, chérie par les norvégiens, on se retrouve pour des petits goûters forts sympathiques, où l'on déguste du thé, des Julekake (gâteaux de Noël) : sortes de pain d'épices débordants de cannelle. On pense cannelle, on vit cannelle, et on dort cannelle ! La chanson elle même, avec ses petites clochettes, vous plonge dans l'atmosphère de Noël, l'accordéon donne un côté frêle à la chanson, comme un petit flocon de neige.

Bref, Katzenjammer, un groupe de 4 filles d'Oslo joue une musique envolée, sucrée et plaisante pour les oreilles. On l'écoute par petites touches, à petites doses, pour ne pas casser la fragile magie de ces petites chansons, et pour ne pas faire une hyperglycémie (overdose de mielleux).


Katzenjammer - bande annonce

L'album Le Pop, permet d'écouter des instruments pas si courants que ça dans des albums de pop-rock : l'accordéon et la mandoline ! Cela contraste avec le nom du groupe Katzenjammer, qui signifie la lamentation du chat, mais qui est utilisé pour désigner une gueule de bois !

Pour la suite, je vous laisse découvrir le groupe. Et si certains apprécient particulièrement, je vous invite à découvrir Major Parkinson, un groupe dans la même veine, qui celui-ci vient de Bergen !


Major Parkinson - Death in the candystore

vendredi 4 décembre 2009

II. Madrugada

Un soir, Ingrid, une amie qui avait séjourné en France, essayait de me donner des points de comparaison entre musique norvégienne et française. En grande amateur (et DJ) de musique qu'elle est, elle me dit d'un coup en me montrant une pochette d'album : "ça, c'est le Noir Désir norvégien"...

Comment trouver un équivalent de Noir Désir en Norvège ? Ce charisme, cet éclat, cette célébrité et cette créativité si subtile (au delà de toute polémique) de Noir Désir, en Norvège... Non, pas possible... Et bien si !

Ca, c'est Madrugada. Un groupe d'Oslo, fondé en 1995, qui a près de 5 albums à son actif. Le jour où j'ai écouté pour la première fois un album de Madrugada, la voix ronde et tortueuse de Sivert Høyem m'a accroché dès le début.



L'album en question était Industrial Silence, sorti en 2000, sûrement le meilleur. Lancez le lien, pendant que vous continuez à lire... Si vous avez vu le film Into the Wild, et que vous avez été marqués par la musique d'Eddie Vedder, la voix du chanteur de Madrugada vous semblera similaire.

Madrugada, qui veut dire Crépuscule en espangol, illustre très bien la musique du groupe. Les accents de guitare semblent s'éteindre, s'estomper sous les rythmiques de plus en plus lentes... Mais ce ralenti est hésitant, se cherche, et ne se trouve pas finalement : la musique et la voix vous entraînent de nouveau, vous mènent en bateau. Ecoutez Beautyproof, pour voir ...





Quel rapport avec le folk me direz vous ? Soyez attentifs et écoutez paisiblement la guitare sèche, égrener les notes pincées, et vous comprendrez alors ce que ce pur groupe de rock'n'roll a de folk...

Malheureusement, le bassiste du groupe, Robert Burås a été retrouvé mort à son domicile en 2008. Un décès qui vint mettre un terme à la carrière d'un des plus célèbres groupes norvégiens...


Watch Madrugada LIVE in Indépendant  |  View More Free Videos Online at Veoh.com


En tout cas, merci Ingrid, j'écoute et réecoute sans cesse cet album avec le même plaisir intense...